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L'ESPACE CIVIQUE DEMEURE MENACÉ PENDANT LA PANDÉMIE DU COVID-19
- L'activisme civique se poursuit pendant la pandémie du COVID-19 et les gens ont continué à se mobiliser pour revendiquer leurs droits.
- On a attesté des cas de violations des droits de manifester tels que desarrestations de manifestants, des manifestations interrompues et l’usage de la force excessive par les Etats.
- Les restrictions à la liberté d'expression et à l'accès à l'information se poursuivent.
- Les États adoptent une législation d'urgence trop étendue ainsi que des mesures législatives limitant les droits humains.
En avril 2020, à peine un mois après que l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a déclaré l'épidémie de COVID-19 comme étant une pandémie, une série de violations alarmantes de l'espace civique par les États a été mise en évidence. Comme indiqué dans notre mémoire de recherche(pdf en anglais), dans de nombreux pays, les mesures d’urgence mises en place pour lutter contre la pandémie ont eu des répercussions préoccupantes sur la situation des droits humains et sur l’espace de la société civile. Après plus de six mois de pandémie, les violations et les restrictions de l’espace civique se poursuivent.
Depuis 2016, le CIVICUS Monitor a fait un travail de documentation et d’analyse sur l'état de l'espace civique au sein de 196 pays. L'espace civique constitue le socle de toute société ouverte et démocratique et s’inscrit dans les libertés fondamentales des personnes de s'associer, de se réunir pacifiquement et d'exprimer librement leurs points de vue et leurs opinions. Ce dossier couvre les évolutions de l'espace civique en relation avec la COVID-19 entre le 11 avril 2020 et le 31 août 2020. Il a été établi à partir des données compilées de nos mises à jour de l'espace civique faites par des militants et partenaires sur le terrain.
Le Droit International des Droits de l'Homme (pdf en anglais) reconnaît que dans le contexte des situations d'urgence publique officiellement proclamées, y compris en matière de santé publique, qui menacent la vie d'un pays, des restrictions à certains droits peuvent être justifiées. Comme expliqué dans notre mémoire précédent, ces limitations doivent être conformes aux normes internationales(en anglais). Mais si le droit international est clair, certains États sont allés au-delà des restrictions justifiables, avec des conséquences négatives sur l'espace civique et les droits humains, en érigeant dans le même temps des barrières supplémentaires pour des groupes déjà en situation d’exclusion.
Bien que les États aient imposé des restrictions aux grands rassemblements publics pendant la pandémie, les gens ont continué à se mobiliser à travers diverses formes de protestation. Cependant, lors des manifestations, un certain nombre de violations ont été enregistrées, notamment l’arrestation de manifestants, les interruptions de manifestations et le recours excessif à la force par les forces de l'ordre. En outre, les violations de la liberté d'expression, qui figuraient à de nombreuses reprises dans notre premier mémoire sur le COVID-19, se sont poursuivies. Ces violations comprennent la censure de la liberté d'expression, le ciblage des organes de presse ainsi que l’arrestation de journalistes. Les États ont également continué à adopter des lois restrictives, telles que des lois d'urgence trop étendues, sous prétexte de lutter contre la pandémie. Des citoyens, des journalistes et des défenseurs des droits humains (DDH) ont été victimes de harcèlement et d'intimidation. Pendant la pandémie, de nombreux groupes exclus ont été confrontés à des risques et violations supplémentaires de leurs droits.
Ces restrictions ont lieu dans une série de pays classés différemment en matière d’espace civique. Lorsqu'un pays est référencé, sa couleur de classification correspondante est également affichée.
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Manifestations à l'ère de la COVID-19
2019 a été une année historique pour les mouvements de protestation, comme le montre notre rapport annuel Le Pouvoir du Peuple attaqué. Dans plusieurs autres pays, des milliers de personnes sont descendues dans la rue notamment au Chili, à Hong Kong (Chine), en Inde et au Liban, et bon nombre de ces mobilisations se sont poursuivies en 2020. Cependant, la pandémie du COVID-19 a mis un terme à de nombreuses manifestations populaires car les États ont introduit des mesures d’urgence, qui comprenaient des restrictions envers les rassemblements publics pour freiner la propagation de la pandémie. Malgré les restrictions, au cours des mois qui ont fait l'objet d'un suivi dans ce mémoire, de nombreuses personnes se sont mobilisées, utilisant des formes de protestation innovantes et alternatives, y compris des manifestations en ligne et d’autres respectant la distanciation sociale.
En Palestine, en avril 2020, des féministes ont organisé des manifestations dites de balcon contre la flambée de violence à caractère sexiste pendant la pandémie. Des vidéos montrent des Palestiniens frappant sur des casseroles et des poêles et brandissant des pancartes sur leurs balcons pour montrer leur solidarité avec les victimes de violence.
Aux Pays-Bas, des militants contre le changement climatique ont collecté des chaussures provenant de tout le pays et ont recouvert la place de la Chambre des Représentants à La Haye d’un millier de chaussures comme forme symbolique de protestation contre la crise climatique. À Singapour, pour leur mouvement de grève scolaire général, les jeunes militants de Fridays for Future (Vendredis pour l’Avenir) contre le changement climatique ont organiséen avril 2020 des manifestations individuelles en raison des lois restrictives du pays sur les rassemblements pacifiques.
En juin 2020, des groupes de défense des droits de l’homme ont organisé (en anglais) des interventions pacifiques pour dénoncer l'ampleur de la crise du COVID-19 au Brésil. À Brasilia, des manifestants ont déposé 1000 croix rendant hommage aux victimes du COVID-19 sur la pelouse devant les principaux bâtiments du gouvernement, fustigeant le président Jair Bolsonaro pour son refus de reconnaitre la gravité de la pandémie.
En outre, les professionnels de santé du monde entier ont organisé des manifestations dans le respect de la distanciation sociale (en anglais)pour mettre en évidence les défis auxquels ils sont confrontés et qui ont été exacerbés par la pandémie.
Ces différents exemples de manifestations qui ont eu lieu pendant la pandémie du COVID-19 démontrent la résilience civique. Les gens ont continué à descendre dans la rue pour revendiquer les droits fondamentaux, même au milieu d'une crise sanitaire mondiale.
Cependant, les manifestations se sont heurtées à de multiples cas d'atteintes aux droits, notamment l’arrestation de manifestants ainsi que les interruptions de manifestations. Ces réponses des autorités sont incompatibles avec le droit et les normes internationales et ne sont pas conformes aux recommandations des mécanismes internationaux, qui soulignent que les représentants de l’ordre doivent s'abstenir de recourir à une force excessive ou d’arrêter arbitrairement des manifestants lorsqu’ils dispersent des rassemblements à caractère pacifique.
Les manifestations contre l'injustice à caractère racial ont figuré en bonne place pendant la pandémie. Le meurtre de George Floyd (en anglais), une personne noire, par la police de Minneapolis le 25 mai 2020 a déclenché des manifestations massives (en anglais) contre la brutalité policière aux États-Unis, sous la bannière de Black Lives Matter. Cependant, dans plusieurs États américains, ces manifestations se sont fréquemment heurtées à des agents des forces de l'ordre militarisés portant des tenues anti-émeute et faisant souvent usage d’une force excessive, y compris l'utilisation de gaz lacrymogène et de balles en caoutchouc. Durant le mois de juin 2020, les manifestations de Black Lives Matter se sont répandues aux quatre coins du monde.
Des milliers de personnes se sont rassemblées pour de multiples manifestations(en anglais) dans diverses villes du Royaume-Uni, scandant « No Justice, No Peace » («Pas de justice, pas de paix»). Ces manifestations se sont également heurtées à une force policière excessive. Des habitants du Sénégal, y compris des militants et des défenseurs des droits humains de renom, ont organisé une manifestation symbolique(en anglais) au mémorial de Gorée-Almadies, qui commémore la traite des esclaves. Les manifestants se sont agenouillés pendant huit minutes et quarante-six secondes, le temps pendant lequel George Floyd a été immobilisé au sol par des policiers.
En juin 2020, des manifestants se sont rassemblés à l'ambassade des États-Unis à Colombo, au Sri Lanka, tenant des pancartes (en anglais)avec des slogans tels que «Le racisme est un virus mortel», tout en portant en même temps des masques conformément aux directives gouvernementales en matière de santé. Malgré cela, la police a commencé à arrêter arbitrairement les manifestants avant le début des manifestations. Au Brésil, les manifestations (en anglais) de Vidas Negras Importam (Black Lives Matter), qui ont eu lieu à Rio de Janeiro et dans d’autres villes, ont dénoncé les violences policières contre la population noire du Brésil et appelé à mettre fin aux opérations de police (en anglais) dans les favelas. La police a dispersé la manifestation pourtant pacifique contre le racisme, en utilisant des balles en caoutchouc et des gaz lacrymogènes.
D'autres manifestations se sont focalisées sur l'impact de la pandémie et les mesures d'urgence. En mai 2020, six personnes, dont une femme enceinte, ont été tuées (en anglais) en Guinée, lors de manifestations contre les points de contrôle de la police COVID-19 ainsi que les barrages routiers qui ont réduit les mouvements de personnes pendant la pandémie.
En Serbie, en juillet 2020, des milliers de personnes sont descendues dans la rue pour protester (en anglais) contre la réintroduction par le gouvernement d'un couvre-feu lié à la COVID-19. Pendant deux jours, les manifestants ont été confrontés à l'usage excessif de la force, avec plus d'une trentaine de personne torturées par la police selon le rapport fait au Centre de Belgrade pour les Droits de l’Homme.
À Hong Kong (Chine), les manifestations se sont poursuivies pendant la pandémie, en particulier contre l'adoption d'une Loi sur la Sécurité Nationale imposée par le gouvernement chinois, loi qui porte atteinte au droit à un procès équitable, donne de nouveaux pouvoirs étendus à la police, accroît les restrictions sur la société civile et les médias et affaiblit le contrôle juridictionnel. Des dizaines de militants pro-démocratie ont été arrêtés (en anglais)et des informations ont fait état de cas de tortures et de traitements cruels, inhumains et dégradants vis-à-vis de manifestants par la police.
Au Chili, en avril 2020, des douzaines de personnes, portant des masques et respectant les mesures de distanciation sociale, se sont mobilisées pour dénoncer les brutalités policières à l'occasion du 93ème anniversaire de la fondation de la police militarisée des Carabineros. Les manifestants ont cependant été accueillis avec des gaz lacrymogènes et des canons à eau, avec plus de 60 personnes détenues au motif de violation des mesures de santé publique.
La liberté d’expression menacée
De la censure des citoyens en raison de la propagation présumée de «fausses nouvelles» sur la pandémie, au ciblage des médias et à la détention de journalistes, la liberté d’expression a été constamment attaquée pendant la pandémie. Cela est particulièrement préoccupant étant donné l’ importance (en anglais) d’avoir accès à des informations exactes et le rôle crucial des journalistes et des médias pendant la pandémie.
Au Zimbabwe, Hopewell Chin’ono, un éminent journaliste zimbabwéen connu pour avoir dénoncé la corruption du gouvernement, a été arrêté (en anglais) en juillet 2020 après avoir fait état de la corruption dans la chaine d’approvisionnement en matière de lutte contre le COVID-19, conduisant au limogeage du ministre de la Santé Obadiah Moyo. Dans une manoeuvre qui a déclenché un tollé international, Chin’ono a été accusé d’« incitation à participer à la violence publique». Des groupes internationaux de surveillance des médias ont appelé à l’abandon de toutes les charges retenues contre Chin’ono, qui a été libéré sous caution en septembre 2020.
Aux Philippines, les atteintes (en anglais) à la liberté d’expression et à la liberté des médias ont persisté.La principale radiotélévision ABS-CBN a été expulsée en mai 2020 après que le Congrès philippin a refusé de renouveler sa licence, tandis que l’éminente journaliste Maria Ressa a été condamnée pour «cyber-diffamation». Les autorités ont également poursuivi les journalistes critiquant la gestion de la pandémie par le gouvernement
Au Turkménistan, où le gouvernement continue de nier l’existence du COVID-19 dans le pays, les autorités ont arrêté (en anglais) et intimidé des personnes, y compris des médecins, pour avoir dénoncé dans les lieux publics les problèmes liés au COVID-19. Le gouvernement a également accusé les médias indépendants qui rapportent sur la pandémie de diffuser des «fausses nouvelles» ainsi que de «diffamation».
En Turquie, la pandémie a été utilisée par le gouvernement pour davantage réprimer les journalistes et les citoyens. Au cours de la pandémie, des journalistes ont été emprisonnés (en anglais) pour «avoir provoqué la panique au sein de la population et publié des rapports sur le coronavirus sans que les autorités en aient pris connaissance». En outre, les plateformes de médias sociaux sont devenues de plus en plus objet de surveillance (en anglais) pendant la pandémie, conduisant à plusieurs détentions de personnes au motif de publier des messages « non fondés et provocateurs » qui « suscitent l’inquiétude, la peur, la panique au sein de la population et l’incitent à cibler des personnes et des institutions ». Environ 6 000 comptes de médias sociaux ont été inspectés par le ministère de l’Intérieur.
En Azerbaïdjan, les autorités sont accusées d’utiliser les mesures de lutte contre le COVID-19 pour bâillonner (en anglais) les militants de la société civile, les dirigeants de l’opposition et les journalistes.A peine un jour avant l’introduction d’un régime de quarantaine spécial, les autorités ont modifié la loi sur l’information, faisant obligation aux détenteurs des sources d’information sur Internet de prévenir la publication de fausses informations en ligne et interdisant la publication d’informations susceptibles de mettre en danger le public. On craint que cet amendement ne conduise à étouffer les journalistes et autres critiques du gouvernement.
Au Nicaragua, de nombreux journalistes et médias indépendants ont remis en question la gestion de la pandémie par le gouvernement et les chiffres officiels du COVID-19, ce qui en a fait des cibles(en anglais). Par exemple, lors d’une conférence de presse, un colonel de l’armée a accusé un journaliste de manipuler l’information et a menacé de «faire quelque chose à ce sujet».Les responsables gouvernementaux ont accusé les journalistes et les médias indépendants de susciter des «pandémies de peur» par le biais de «fausses informations» pendant la crise.
Au Niger, trois personnes ont été arrêtées (en anglais) et inculpées en vertu de la loi de 2019 sur la cybercriminalité pour avoir critiqué sur les réseaux sociaux et dans des messages privés WhatsApp les mesures prises par le gouvernement pour lutter contre le COVID-19
Lois restrictives sous la pandémie
Au fur et à mesure de la progression de la pandémie, les États ont continué à promulguer des mesures législatives d'urgence trop étendues et vagues et à adopter des lois restrictives sans consultation adéquate avec la société civile. Dans de nombreux États, la législation d’urgence a été utilisée pour réprimer les «fausses informations» sur la pandémie, ce qui a eu des conséquences néfastes sur la liberté des médias.
Au Botswana, le gouvernement a adopté l Emergency Powers Act / Loi sur les Pouvoirs d'Exception (en anglais), donnant au président le pouvoir de gouverner par décret pendant six mois. La loi a également introduit de lourdes peines pour les infractions, y compris une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à cinq ans ou une amende de 10 000 USD pour quiconque publie des informations avec «l’intention de tromper» le public au sujet du COVID-19 ou des mesures prises par le gouvernement pour lutter contre la pandémie.Il stipule également que les journalistes ne peuvent en référer qu’au directeur des services de santé du pays ou à l’OMS lorsqu’ils rendent compte du COVID-19.
Au Cambodge, une Loi sur l'État d'Urgence a été adoptée (en anglais) en avril 2020 qui confère un pouvoir illimité à l'exécutif.La loi confère le pouvoir exécutif d'interdire ou de réduire les participants aux réunions et de fermer les espaces publics ou privés.Il permet également au gouvernement de mettre en place les moyens de surveiller tous les systèmes de télécommunications et d'interdire ou de restreindre les informations ou les médias sociaux qu'on estime de nature à « susciter la peur au sein du public ou provoquer des troubles, ou qui pourraient porter atteinte à la sécurité nationale, ou quipourrait semer la confusion sur l'état d'urgence ».La Loi sur l'État d'Urgence ne contient aucune clause de caducité et ne peut être levée que par Décret Royal, ce qui pourrait permettre à la loi d'être utilisée bien au-delà de la fin de la pandémie actuelle.
Au Kirghizistan, sous couvert de restrictions dues au COVID-19, une consultation limitée de la société civile a été autorisée pour un nouveau projet de loi relatif aux amendements à la législation régissant les activités des organisations de la société civile (OSC). La loi, qui a été adoptée en deuxième lecture, a été critiquée par la société civile comme une tentative injustifiée de discréditer et de diaboliser les OSC.Seules 60 personnes ont été autorisées à participer à la séance publique sur le projet de loi en mai 2020, tandis que la plupart des organisations pro-gouvernementales y ont pris part,de nombreux militants indépendants ont été écartés, limitant ainsi sérieusement la consultation.
L' Égypte est en état d'urgence depuis 2017, état qui a été prolongé en mai 2020 en raison de la pandémie.En dépit de cela, la loi accordant l’extension a ratifié (en anglais) de nouveaux amendements qui donnent plus de pouvoirs au président. La Loi d'Urgence (Loi 162 de 1958) exploite le COVID-19 afin de saper l'indépendance judiciaire et d'élargir la compétence du parquet militaire pour enquêter sur les citoyens, et donne au président le pouvoir d'autoriser le parquet militaire à enquêter sur les crimes qui enfreignent la Loi d'Urgence (article 4).Elle contient également de nouveaux articles qui accordent au président le pouvoir d'interdire les réunions publiques et privées, les manifestations, les processions, les célébrations et autres formes de rassemblement.
En Hongrie, la Loi d'Autorisation a été adoptée (en anglais) le 30 mars 2020, accordant au gouvernement des pouvoirs excessivement larges pour statuer par décret, le dispensant de tout contrôle parlementaire. En juin 2020, le gouvernement a annoncé la fin de «l’état de danger», mais a immédiatement déclaré un «état de crise médicale», qui ne peut être levé par le Parlement.On craint que cette nouvelle situationjuridique ne soit utilisé comme un écran de fumée pour maintenir des pouvoirs gouvernementaux sans contrôle et excessifs.
Les groupes exclus se retrouvent davantage en danger
Alors que les restrictions du COVID-19 imposées par les États ont affecté toutes les personnes, elles ont frappé sans commune mesure les groupes exclus qui étaient déjà à risque avant la pandémie. Pendant cette période, nombreux États ont encore plus bafoué les droits des personnes LGBTQI +, des migrants, des réfugiés et d'autres groupes en situation d’exclusion.
En Ouganda, à la suite d’une perquisition (en anglais) dans un refuge abritant 23 personnes LGBTQI +, la police a été accusée d'avoir abusé des mesures de confinement.Des arrestations ont été effectuées pour non-respect apparent des règles de distanciation sociale et pour risque de propagation du COVID-19. Cependant, les militants pensent que le groupe a été délibérément ciblé en raison de leur orientation et identité sexuelle. Il y a également eu des reportages qui accusent les groupes LGBTQI + de propager le COVID-19, ce qui a attisé davantage l'homophobie dans le pays.
En Inde, les travailleurs migrants du secteur informel ont profondément souffert (en anglais) de l'annonce soudaine et immédiate par le gouvernement d'un confinement à l'échelle nationale en mars 2020. Le gouvernement a fermé les chemins de fer et les services de bus interétatiques pour freiner la propagation du virus.De nombreux travailleurs migrants qui avaient perdu leur emploi ont décidé de rentrer chez eux dans leur famille, avec certains bravant des centaines de kilomètres de voyage à pied.Cela a entraîné le chaos, la famine et la mort, ce qui a poussé la Haut-Commissaire des Nations Unies aux Droits de l'Homme, Michelle Bachelet, à appeler à(en anglais) un traitement humain des groupes de migrants.
Les autorités du Myanmar ont utilisé les mesures de riposte au COVID-19 comme prétexte pour harceler et extorquer (en anglais) les Rohingyas, une communauté qui a été victime ces dernières années de graves crimes internationaux aux mains de l’armée.Les Rohingyas rapportent que les forces militaires et de police les soumettent régulièrement à des harcèlements et à des châtiments corporels aux points de contrôle.Il y a un cas où une femme a reçu l’ordre de faire des abdominaux pendant 30 minutes pour n’avoir pas porté de masque à un point de contrôle, après quoi elle fut abandonnée, trop épuisée qu'elle était pour bouger. En outre, malgré la pandémie, les autorités ont maintenu une coupure d’Internet dans l’État de Rakhine, où vivent environ 600 000 Rohingyas, les privant de l’accès à des informations potentiellement vitales.
Au Panama, durant le mois de juin 2020, les cas de COVID-19 ont recommencé à grimper, ce qui a entraîné la réintroduction des mesures de confinement dans certaines régions du pays.Les activités de confinement (en anglais) du Panama comprenaient des mesures contestées fondées sur le sexe (en anglais), qui attribuaient des jours séparés aux femmes et aux hommes pour mener des activités essentielles;Les groupes de défense des droits des transgenres rapportent que cela a conduit à une stigmatisation accrue des personnes transgenres. Une organisation de défense des droits des transgenres a enregistré plus de 40 plaintes de personnes transgenres qui ont été victimes de harcèlement alors qu’elles achetaient de la nourriture et des médicaments pendant ces restrictions.
Les DDH (Défenseurs des Droits de l’Homme)ont également été attaqués. Au Honduras, l’instauration des mesures de couvre-feux et de restriction des mouvements a conduit à une augmentation (en anglais) des risques de persécution, de surveillance et de criminalisation des défenseurs. Les femmes autochtones ont également été victimes d'un surcroît de harcèlement de la part des agents des forces de l’ordre.De même, en Colombie, les restrictions de mouvement pendant la pandémie ont accru les risques (en anglais) pour les animateurs de la société civile qui, pour des raisons de sécurité, doivent varier leurs déplacements.
Notes positives pendant la pandémie
Tandis que les restrictions imposées par de nombreux États brossent un tableau inquiétant à l’échelle mondiale, il y a également eu quelques évolutions encourageantes pendant la pandémie. Au Kenya, des militants et des OSC ont attaqué avec succès devant le tribunal l'usage de la force excessive par la police pendant la pandémie, ce qui a conduit à l’inculpation d’au moins une douzaine d’agents. En mars 2020, à la suite d’un tollé suscité dans l’opinion publique, des militants des droits humains sont descendus dans la rue pour protester contre le recours excessif à la force par la police, qui a considérablement augmenté pendant le couvre-feu dû au COVID-19.Les enquêtes menées par l’Unité des Affaires Intérieures ont révélé que plus d’une douzaine de personnes avaient été tuées par la police pendant l’application du couvre-feu.
En Bolivia, le gouvernement intérimaire a promulgué un décret (en anglais) sanctionnant ceux qui «désinforment ou causent de l’incertitude» à la population pendant la pandémie.La législation a été largement critiquée par les OSC et les défenseurs de la liberté des médias qui ont déclaré qu’elle pourrait être utilisée pour réduire au silence ceux qui critiquent les politiques du gouvernement en matière de COVID-19.La loi a également été élargie pour inclure un décret additionnel relatif aux sanctions pénales.Cependant, dans un geste positif, suite aux critiques des OSC nationales et internationales, la présidente par intérim Jenine Áñez a révoqué les deux décrets.
S'agissant d'une autre victoire pour la liberté des médias, au Honduras, un décret (en anglais) instituant l’état d’urgence pendant la pandémie avait restreint le droit à la liberté d’expression sans aucune censure, tel que garanti par la Constitution hondurienne. Les associations de médias ont exhorté le gouvernement à révoquer cette restriction, avec 21 OSC condamnant le décret le qualifiant de mesure disproportionnée. Suite à cette pression, le gouvernement a rétabli les garanties constitutionnelles relatives à la liberté d’expression.
Dans un geste sans précédent, en Autriche en mars 2020, une loi adoptée par le parlement pour lutter contre la pandémie de COVID-19 a fait mention des OSC, pour la première fois dans l’histoire de l’Autriche. Les demandes des OSC ont été prises en compte (en anglais) dans le fonds d’urgence COVID-19 du gouvernement et un fonds d’appui de 700 millions d’euros (environ 818 millions de dollars américains) a été alloué exclusivement aux OSC pendant la pandémie.