Chad: Closing Political Space Ahead of Referendum https://t.co/yBpSThZ1eP
— Human Rights Watch (@hrw) October 15, 2023
Contexte
L'ESPACE POLITIQUE SE REFERME À L'APPROCHE DU RÉFÉRENDUM CONSTITUTIONNEL
Des dizaines de membres et de sympathisants des Transformateurs, le principal parti d'opposition, ont été arrêtés le 8 octobre 2023, quelques jours après l'apparition sur les réseaux sociaux d'un mandat d'arrêt contre Succès Masra, le chef du parti. D'après Human Rights Watch (HRW), il s'agirait d'une tentative destinée à limiter la contestation politique à l'approche du référendum constitutionnel.
Le 5 octobre 2023, Masra a informé le ministre de la Sécurité publique de son intention de retourner au pays le 18 octobre 2023, après l'avoir fui à la suite des manifestations meurtrières du « jeudi noir », le 20 octobre 2022. Le mandat d'arrêt pour « tentatives d'atteinte à l'ordre constitutionnel » et pour « incitation à la haine et à un soulèvement insurrectionnel » est apparu sur les réseaux sociaux le même jour : il avait été émis en juin 2023, mais n'avait jamais été rendu public. Par conséquent, Masra a décidé de reporter son retour au Tchad.
HRW a signalé qu'au moins 78 personnes ont été arrêtées et conduites au siège de l'Agence nationale de sécurité (ANS) à N'Djamena. Six ont été libérées sans charges le 8 octobre 2023.
Comme nous l'avons signalé sur le Monitor CIVICUS, Les Transformateurs ont été suspendus au lendemain de la répression des manifestations de masse le 20 octobre 2022. La suspension avait été levée trois mois plus tard.
Le référendum constitutionnel qui ouvrira la voie à de nouvelles élections et au retour à un régime civil devrait se tenir le 17 décembre 2023. Un projet de constitution a été approuvé le 27 juin 2023 par le Conseil militaire de transition, qui a remplacé l'Assemblée nationale après la prise de pouvoir par les militaires.
1/ One year ago, on Oct. 20, the regime of Chad’s military ruler, Mahamat Idriss Deby, carried out a bloody crackdown on protests against his decision to extend his power by two years.https://t.co/AQphszMHn9
— Human Rights Foundation (@HRF) October 25, 2023
Liberté de réunion pacifique
JEUDI NOIR : DES ZONES D'OMBRE PERSISTENT UN AN APRÈS LA RÉPRESSION DES MANIFESTATIONS
Un an après la répression brutale des manifestations du « jeudi noir », le 20 octobre 2022, peu a été fait pour mener une enquête indépendante sur les violations des droits de l'homme qui ont été commises et pour demander des comptes aux responsables. Ce jour-là, les forces de sécurité ont tiré à balles réelles et ont fait un usage excessif de la force contre les manifestants, tuant des dizaines de personnes. Elles ont arrêté des centaines de personnes qui s'étaient rassemblées pour protester contre la décision de la junte militaire de prolonger de deux ans la période de transition.
Dans son rapport publié en février 2023, la Commission nationale des droits de l'homme du Tchad (CNDH) indique qu'au moins 128 personnes ont été tuées lors de la répression des manifestations, notamment à N'Djamena, Moundou, Doba, Koumra et Sarh. L'enquête de la CNDH a également révélé que 518 personnes ont été blessées, 943 ont été arrêtées, 435 ont été détenues et 12 ont disparu.
Un autre rapport publié en avril 2023 par la Ligue tchadienne des droits de l'homme (LTDH) et l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) a révélé qu'au moins 218 personnes ont été tuées, des dizaines ont été torturées et au moins 1300 ont été détenues.
DES MANIFESTANTS GRACIÉS
En mai 2023, 64 personnes condamnées pour avoir participé aux manifestations du « jeudi noir » ont été libérées de prison à la suite d'une grâce accordée par le chef de l'État et président de la transition, Mahamat Idriss Déby. Comme nous l'avons indiqué sur le Monitor CIVICUS, 259 personnes avaient été graciées en mars 2023.
Tchad : mesures draconiennes adoptées pour dissiper les attroupements armés et non armés https://t.co/TgPdfqromM pic.twitter.com/wSgW8NYjF1
— Alwihda Info (@alwihdainfo) August 1, 2023
MANIFESTATIONS INTERDITES
Le 1ᵉʳ août 2023, les autorités ont publié une nouvelle ordonnance sur les attroupements qui impose de lourdes sanctions aux personnes refusant de se disperser après une première sommation par les forces de sécurité. Cette norme prévoit des peines de deux mois à un an de prison, ainsi que d'autres sanctions telles que l'interdiction de voyage et l'assignation à résidence. En vertu de cette ordonnance, tous les rassemblements — armés ou non — susceptibles de troubler l'ordre public sont strictement interdits. En outre, les forces de sécurité peuvent employer la force contre des manifestants pacifiques et non armés s'ils refusent de se disperser après la troisième sommation. Les personnes condamnées pour participation ou provocation à un attroupement sont également tenues responsables des dommages causés par celui-ci.
Le 27 octobre 2023, le ministre de la Sécurité publique et de l'immigration, Mahamat Charfadine Margui, a interdit une manifestation du parti politique Mouvement révolutionnaire pour la démocratie et la paix (MRPD) prévue le lendemain, invoquant des risques pour l'ordre public. Une autre manifestation prévue le 26 août 2023 avait également été interdite.
Les manifestations étaient régulièrement interdites au Tchad même avant l'adoption des réglementations restrictives prévues par l’ordonnance. Le 12 juillet 2023, le ministre de la Sécurité publique et de l'Immigration a interdit une manifestation organisée par le parti Rassemblement pour la justice et l'égalité au Tchad (RAJET) prévue le 14 juillet 2023, au motif que la demande de la formation ne comportait pas de copie de l'arrêté autorisant le parti et que le domicile de l'organisateur de la marche n'était pas mentionné.
#Chad: Alwihda Info suspended over coverage of president
— CPJ Africa (@CPJAfrica) August 25, 2023
“Chadian authorities should reverse their decision to suspend @alwihdainfo at once and ensure media outlets do not face retaliation for covering issues of public interest,” said @angelaquintal. https://t.co/qd8OtxoqeZ
Liberté d'expression
UN SITE D'INFORMATION SUSPENDU PENDANT HUIT JOURS
Le 25 août 2023, la Haute Autorité des médias et de l'audiovisuel (HAMA) a suspendu le site d'information Alwihda Info durant huit jours en raison de sa couverture médiatique du président de transition, Mahamat Idriss Déby Itno. Le régulateur reproche au site d'information d’avoir diffusé des « propos injurieux » sur le président et « de nature à porter atteinte à la cohésion et à la discipline au sein de l’armée ». Cette décision fait référence à deux articles publiés par Alwihda : un premier le 19 août 2023 sur le licenciement d'un colonel par le général Idriss Déby Itno et un second à propos du discours prononcé par le président le 21 août 2023 sur le conflit dans le nord du pays.
À la suite de cette suspension, le 26 août 2023, des agents de l'Agence nationale de sécurité (ANS) ont empêché le journaliste d'Alwihda Info, Ahmat Abdoulaye, de couvrir un événement officiel organisé par le ministère des Transports dans la ville de Bardaï, alors qu'il y avait été invité. Par ailleurs, le directeur de publication du média, Djimet Wiché, a révélé qu'il avait été suivi par deux voitures le 26 août au soir. Soupçonnant que les véhicules appartenaient à l'ANS, il a dû se cacher et n'a pas pu regagner son domicile.