A court in Dakar, #Senegal on Tuesday ordered a temporary release of journalist Pape Alé Niang. The journalist was arrested again on December 19, 2022, after he was released from a 6-week detention.#FreePapeAleNiang
— Media Foundation for West Africa (@TheMFWA) January 11, 2023
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Liberté d'expression
Un journaliste d'investigation reste plusieurs semaines en prison accusé de délits contre la sécurité nationale
Le 6 novembre 2022, le journaliste d'investigation du site d'information Dakar Matin, Pape Alé Niang, a été arrêté à cause d’une émission vidéo en direct dans laquelle il a affirmé qu'un rapport interne de la Gendarmerie nationale disculperait le chef de l'opposition Ousmane Sonko, accusé de viol en mars 2021.
Le 9 novembre 2022, Niang a été inculpé pour « divulgation d’informations de nature à nuire à la défense nationale, recel de documents administratifs et militaires, et diffusion de fausses nouvelles de nature à jeter le discrédit sur les institutions publiques ». Des accusations que Me Ciré Clédor Ly, son avocat, a qualifiées de « montagne d'hérésies ». Seydi Gassama, directeur d'Amnesty International Sénégal, commente :
« La sécurité nationale et l’ordre public ne doivent pas être utilisés abusivement pour torpiller la liberté d’expression ou le droit à l’information. Nous demandons aux autorités de respecter le travail journalistique, de ne pas contraindre les journalistes à divulguer leurs sources d’information et de ne pas pénaliser les lanceurs d’alerte qui publient des informations d’utilité publique »
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Niang a été mis en liberté provisoire six semaines plus tard, le 14 décembre 2022, et a été placé sous contrôle judiciaire. Dans le cadre de sa libération sous caution, son passeport lui a été confisqué, et on lui a interdit de voyager à l’étranger et de parler de l’affaire. Il s'était mis en grève de la faim le 2 décembre 2022.
Niang a été arrêté de nouveau le 19 décembre 2022 pour avoir violé les conditions de sa liberté sous caution. Il aurait évoqué les poursuites dont il fait l'objet lors d'une émission en direct sur Facebook, ce qui a été démenti par ses avocats.
Niang a été placé sous contrôle judiciaire et remis en liberté provisoire le 10 janvier 2023, mais il est tenu de se présenter au poste de police une fois par semaine. Il a entamé une nouvelle grève de la faim pour protester contre son incarcération.
Des défenseurs de la liberté de la presse et des journalistes se sont mobilisés contre l'arrestation de Niang. Ils ont convoqué des sit-in et des marches, ont lancé des campagnes sur les réseaux sociaux et ailleurs, et ont adressé des pétitions aux organes des Nations Unies. Par ailleurs, la Coordination des associations de presse (CAP) a mis en place le Comité pour la libération de Pape Alé Niang.
Second Journalist Jailed in #Senegal. First it was Dakar Matin’s Pape Ale Niang, now it’s WalFadjri’s Pape Ndiaye. Drop the charges and free him now. #JournalismIsNotACrime. https://t.co/XFRZN1ye0a
— Angela Quintal (@angelaquintal) March 9, 2023
Détention d'un journaliste pour diffusion de fausses nouvelles
Le 3 mars 2023, le journaliste et chroniqueur judiciaire de Walf TV, Pape Ndiaye, a été placé en détention provisoire pour « diffusion de fausses nouvelles » et « outrage à magistrat ». Initialement, Ndiaye avait été convoqué par la police en raison de déclarations faites par le journaliste lors de l'émission matinale Petit-déj sur une affaire d'agression sexuelle présumée commise par Ousmane Sonko, chef de l'opposition. Durant l'émission en direct, Ndiaye a affirmé que tous les substituts du parquet de Dakar étaient en faveur d'un non-lieu, mais que cela n'avait pas été pris en compte par le procureur sur ordre du chef de l'État.
Selon la presse, lors de son interrogatoire, des agents de police lui ont demandé de révéler ses sources pour ces affirmations.
Sénégal: la chaîne Walf TV suspendue pour sept jours https://t.co/ZwJcnItv9F pic.twitter.com/Xtl4w8xNQJ
— RFI (@RFI) February 12, 2023
Sept jours de suspension pour la chaîne Walf TV
Le 10 février 2023, le Conseil national de régulation de l'audiovisuel (CNRA) a suspendu les émissions de Walf TV pour une durée de sept jours avec effet immédiat. Le CNRA a soutenu que la suspension était due à la « couverture irresponsable des manifestations à Mbacké [par la diffusion] en boucle des images de violences exposant des adolescents, accompagnées de propos dangereux, y compris de la part des reporters, en violation totale de la réglementation ». La manifestation, organisée par le parti d'opposition Pastef, a dégénéré en affrontements entre manifestants et forces de sécurité. Elle avait été interdite par les autorités.
Agression d’une cadreuse lors d'une manifestation
Le 5 novembre 2022, des policiers auraient agressé physiquement Fatou Dione, cadreuse du média numérique Buur News, alors qu'elle couvrait une manifestation à Dakar. Durant la manifestation, organisée par le Collectif pour la libération des détenus politiques (COLIDEP), la police a bousculé Dione, qui est tombée à terre et a perdu connaissance (voir Liberté de réunion pacifique).
#Sénégal : interdiction d’une manifestation de l’opposition contre des irrégularités dans un fonds anti-Covid. La gestion des deniers publics, « le recul démocratique et l’impunité des hommes du pouvoir » sont au cœur de la contestation 👇https://t.co/Ler3xjF4Mp
— Le Monde Afrique (@LeMonde_Afrique) January 6, 2023
Liberté de réunion pacifique
Interdiction et dissolution de plusieurs manifestations
Le 3 novembre 2022, le préfet de Dakar a pris un arrêté interdisant une manifestation organisée par le Collectif pour la libération des détenus politiques (COLIDEP) programmée le 5 novembre 2022 sur la place de l'Indépendance à Dakar, en faveur de la libération de prisonniers politiques. Le préfet a pris sa décision en raison des « risques de trouble à l'ordre public et d'entraves à la libre circulation des personnes et des biens ».
Malgré l'interdiction de la manifestation, plusieurs personnes ont tenté de se rassembler le 5 novembre 2022, mais des policiers auraient bouclé la place de l'Indépendance. Au moins 17 membres de la COLIDEP auraient été arrêtés pour avoir enfreint l'interdiction de manifester. De plus, la police a agressé la cadreuse Fatou Dione (voir Liberté d'expression).
Le préfet de Dakar a également interdit une manifestation contre les irrégularités dans la gestion d'un fonds public contre la COVID-19 révélées par un rapport d'audit de la Cour des comptes. La manifestation avait été convoquée par la coalition d'opposition Yewwi Askan Wi et devait se tenir le 6 janvier 2023 sur la place de la Nation à Dakar. Pour justifier sa décision, le préfet a avancé que les travaux sur la place de la Nation en vue de la fête de l'Indépendance rendaient « impossible la tenue de rassemblements en raison des risques d’accident » et de retard des travaux. Une autre manifestation organisée par la société civile s'est tenue à Dakar le 30 décembre 2022 et se serait déroulée sans incident.
Comme nous l'avons signalé sur le CIVICUS Monitor, les autorités locales ont interdit les manifestations organisées par la coalition de l'opposition en juin 2022 en réponse à l'invalidation de sa liste électorale par la Cour constitutionnelle.
Sénégal: à Dakar, le concert «pour la limitation à 2 mandats présidentiels» interdit par le préfet https://t.co/ttEoKCRXi7 pic.twitter.com/9F1SdmS5t2
— RFI (@RFI) September 17, 2022
Interdiction d'un concert panafricain de la société civile
En septembre 2022, le préfet de Dakar a interdit un concert de la société civile pour la « limitation à deux mandats présidentiels » programmé le 17 septembre 2022 à l'hôtel Radisson Blu de Dakar. L'événement s'inscrivait dans le cadre de la Campagne citoyenne pour la limitation des mandats et devait réunir onze artistes de sept pays et être le lieu de présentation d'une nouvelle chanson célébrant la démocratie et la bonne gouvernance.
D'après un communiqué du groupe prodémocratie Tournons la page, un des promoteurs du concert, une demande d'autorisation avait été déposée à la préfecture de Dakar le 2 septembre 2022. Le préfet a interdit le concert à la dernière minute — le 17 septembre 2022 — en invoquant des « risques de trouble à l'ordre public et d'accidents », tout en précisant que le lieu qui devait accueillir l'événement « ne présent[ait] pas toutes les garanties de sécurité pour une manifestation d'une telle dimension ».
Le concert et son interdiction sont intervenus dans un contexte marqué par le silence du président Macky Sall sur sa volonté de briguer ou non un troisième mandat en 2024, ce qui serait inconstitutionnel, puisque la Constitution sénégalaise n'autorise que deux mandats consécutifs au maximum. Cependant, les partisans du camp présidentiel défendent que la révision constitutionnelle de 2016 a remis les compteurs à zéro et que Macky Sall pourrait donc briguer un nouveau mandat. En réponse au silence de Macky Sall, une dizaine d'OSC ont lancé l'initiative Jàmm a Gën 3ᵉ mandate (« La paix vaut mieux qu'un troisième mandat » en wolof) en octobre 2022.
Tribunal d'Instance : Les activistes Ousmane Sarr et Cie écopent 2 mois de prison ferme https://t.co/KHr877bBXs pic.twitter.com/SRk0cARPvs
— Dakaractu.com (@dakaractu) January 16, 2023
Liberté d'association
Deux mois de prison pour deux militants
Le 12 janvier 2023, un tribunal de Dakar a condamné les militants Bayna Guèye, Ousmane Sarr et Ahmad Sourang Diallo à une peine de prison de deux mois pour « participation à une manifestation non déclarée ». Ils ont été arrêtés le 3 janvier 2023 pour avoir scandé « Libérez Pape Alé Niang », un journaliste détenu depuis novembre 2022 (voir Liberté d'expression), lors d’une rencontre entre le premier ministre et des OSC pour discuter de la sortie d’un rapport de la Cour des comptes sur des irrégularités dans la gestion d'un fonds contre la COVID-19.