Cameroon: Opposition Leaders, Supporters Detained https://t.co/hXXWNSqrYF
— Human Rights Watch (@hrw) October 19, 2020
Liberté de réunion pacifique
Détention de manifestants et interdiction et dispersion des manifestations de l'opposition
Les forces de sécurité ont dispersé avec une grande violence les manifestations nationales du 22 septembre convoquées par l'opposition en réponse à l'annonce du président Biya de tenir des élections régionales en décembre 2020. En outre, elles ont utilisé des gaz lacrymogènes et des canons à eau pour disperser les manifestants. Des centaines de manifestants ont été arrêtés et certains ont été battus aussi. Selon le parti d'opposition Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), plus de 500 personnes ont été arrêtées et seulement 155 ont été remises en liberté. Quant aux autorités, elles affirment que 294 personnes ont été arrêtées et 176 libérées. Plusieurs journalistes couvrant ces manifestations ont été agressés, arrêtés ou ont vu leur équipement confisqué (Cf. Liberté d'expression).
Auparavant les autorités avaient interdit ces manifestations et avaient émis de fermes avertissements pour ceux qui voudraient défier l'interdiction. Le 15 septembre 2020 le ministre de la Communication a déclaré que ces manifestations pourraient être considérées comme « insurrectionnelles » et que les personnes arrêtées pourraient être poursuivies en vertu de la loi antiterroriste. Le jour des manifestations les forces de sécurité ont été déployées afin de dissuader la population de manifester.
Lewis Mudge de Human Rights Watch commente :
« Ces mesures sont une tentative à peine voilée de la part du gouvernement camerounais de se servir de la pandémie de COVID-19 et d’une loi antiterrorisme draconienne comme prétextes pour supprimer le droit à la liberté de réunion. Les autorités devraient s’efforcer de protéger et de faciliter l’exercice de ce droit, au lieu de chercher des moyens de le restreindre. »
Plusieurs rapporteurs spéciaux des Nations unies, dont le rapporteur spécial sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association, Clément Nyaletsossi Voulé, ont publié le 12 octobre 2020 une déclaration commune appelant les autorités camerounaises à libérer le chef du MRC Maurice Kamto et d'autres personnes arrêtées lors des manifestations (Cf. Liberté d'association), et à mettre fin à l'intimidation des militants politiques. Dans cette déclaration les rapporteurs spéciaux de l'ONU affirment :
« Nous sommes préoccupés par l'usage excessif de la force contre des manifestants pacifiques par les forces de sécurité camerounaises. La violence contre les manifestants a été disproportionnée, avec utilisation de gaz lacrymogènes et de canons à eau pour les disperser violemment. »
Défilé de femmes après une attaque contre une école à Kumba qui a coûté la vie à sept enfants
Des centaines de femmes ont défilé à Kumba pour exprimer leur colère et demander justice une semaine après l’attaque perpétrée contre l'Académie internationale bilingue Mère Francisca à Kumba, région du Sud-Ouest, le 24 octobre 2020. Des hommes armés ont tué sept enfants et ont blessé au moins treize autres. Les autorités locales ont autorisé la manifestation. À Douala et à Yaoundé, des organisations de la société civile auraient convoqué des manifestations dans les jours qui ont suivi l'attaque, malgré l'interdiction des rassemblements.
Liberté d'association
Arrestations de membres de l'opposition et de sympathisants
Plusieurs membres et sympathisants de l'opposition ont été arrêtés pour les manifestations du 22 septembre 2020. Maurice Kamto, chef du mouvement d'opposition MRC, a été assigné à résidence de fait depuis le 20 Septembre 2020 car les forces de sécurité ont été déployées autour de sa résidence à Yaoundé. Neuf membres du MRC, dont le porte-parole de Maurice Kamto Olivier Bibou Nissack et le trésorier du MRC Alain Fogue Tedom, ont été arrêtés le 22 septembre 2020 et ont accusés plus tard de « tentative de révolution », de « rébellion » et d'« attroupement aggravé ». Le 30 octobre 2020 39 autres membres du MRC ont comparu devant un juge d'instruction, dont 36 ont été envoyés en prison pour les mêmes chefs d'accusation.
En outre, quatre membres de Stand Up for Cameroon, une plate-forme de partis d'opposition et d'organisations de la société civile, auraient été arrêtés le 18 septembre 2020 après avoir assisté à une réunion à Douala.
#Cameroon: Michael Loumou of Radio Carrefour was freed today. He was the last of the 8 journalists detained on Monday for covering opposition protests. Cameroon remains the second worst jailer of journalists in sub-Saharan Africa with at least 7 others still in jail. #FreeThemNow
— CPJ Africa (@CPJAfrica) September 24, 2020
Liberté d'expression
Arrestation, agression et saisie de l'équipement des journalistes couvrant les manifestations de l'opposition
Selon des informations parues dans la presse, plusieurs journalistes qui couvraient les manifestations ont été arrêtés et agressés physiquement par les forces de sécurité. Ces dernières ont également confisqué l'équipement des journalistes. A Yaoundé, des agents de police ont interrogé et battu le correspondant de Radio France Internationale (RFI) Polycarpe Essomba. Ils l'ont aussi fouillé et ont saisi son matériel. Essomba a été conduit dans plusieurs commissariats de police avant d'être relâché en fin de journée. Son équipement lui a été rendu. Reinnier Kaze, correspondant de l'Agence France-Presse, aurait été arrêté. Le caméraman d'Équinoxe TV, Rodrigue Ngassi, a été agressé et il a dû être emmené à l'hôpital. Les journalistes Lindovi Ndjio et William Omer Tchuisseu, respectivement de la Nouvelle Expression et de La Voix du Centre, ont été relâchés. Jarvis Tah Mai et Christian Tebong de Media Prime TV ont été arrêtés alors qu'ils couvraient une manifestation à Douala. Arnaud Froger de Reporters sans frontières (RSF) s'insurge :
Ces reporters n’ont pourtant commis aucune infraction et les agissements des forces de sécurité n’avaient rien à voir avec le maintien de l’ordre. Les méthodes brutales utilisées ne visent qu’à intimider les journalistes et qu'à censurer une actualité qui dérange les autorités. Les auteurs de ces faits doivent être sanctionnés. »
Cambriolage au bureau du quotidien Le Jour
La veille des manifestations de l'opposition du 22 septembre 2020, des personnes non identifiées ont pénétré par effraction dans les bureaux du quotidien Le Jour et ont soustrait du matériel informatique, des archives du journal et des documents sur les enquêtes en cours du média. Le rédacteur en chef du Jour a déclaré à RFI :
« Il faut absolument que nos confrères qui veulent continuer à pratiquer ce métier dans des conditions à peu près acceptables, au Cameroun, continuent à résister, à résister à toutes ces intimidations qui n’ont aucun sens. On doit le faire, c’est notre métier. C’est tombé sur nous et nous devons le faire. »