Les réfugiés burundais font toujours face à une myriade de défis, même dans les pays où ils se sont installés pour des raisons de sécurité. Le 3 octobre 2019, près de 600 réfugiés burundais ont quitté les camps en Tanzanie pour rentrer chez eux à cause de l'insécurité croissante dans ces camps où des viols, des arrestations et des passages à tabac ont souvent été signalés. Sur les dix personnes interviewées par les journalistes de Reuters, toutes ont déclaré qu'elles étaient rentrées volontairement chez elles dans l'espoir d’y trouver plus de sécurité que dans les camps.
Par ailleurs, la situation des droits de l'homme dans le pays reste dramatique, même au sein des institutions publiques, car un nouveau rapport publié par l’ACAT-Burundi le 10 octobre 2019 a révélé des violations et des abus dans les prisons burundaises. Ce rapport fournit des détails concernant l'entrave à la liberté des prisonniers acquittés, les violations du droit aux soins médicaux et plusieurs cas de torture commis notamment par des membres des Imbonerakure habillés comme les membres du comité de sécurité de la prison.
Liberté d'association
Le 30 octobre 2019, l'Envoyé spécial des Nations Unies au Burundi, Michael Kafando, a annoncé qu'il envisageait de démissionner du poste qu'il occupait depuis deux ans sur fond d'inquiétudes concernant l'impartialité des élections de 2020. Selon Kafando « la situation au Burundi reste précaire » avec « une intolérance politique croissante et des atteintes aux libertés civiques et politiques ». Cependant, il a également noté que la sécurité s'est améliorée et que le gouvernement a mis en place un « cadre pour le dialogue politique ». Un mois avant la démission de Kafando, le Burundi avait menacé de rompre les liens avec lui, ce qui a conduit le Conseil de sécurité à l'annulation soudaine d'une réunion sur la situation dans le pays.
#Burundi — Marie Claire Niyongere, a woman leader within CNL opposition party in Kiganda/Muramvya province was raped and then killed on November 12th. She was 40 years old. https://t.co/1ZnpxWvr9T
— iBurundi (@iburundi) November 14, 2019
Les membres des partis d'opposition sont toujours pris pour cible. Le 15 novembre 2019, il a été signalé que Marie Claire Niyongere, chef adjointe de l'aile féminine du principal parti d'opposition, le Congrès pour la liberté (CNL), de la commune de Kiganda, avait été tuée après avoir été violée. Son corps avait été abandonné dans une forêt où il a été retrouvé le 12 novembre : il présentait des blessures au cou et aux parties génitales. Comme nous l’avions signalé précédemment sur le Monitor CIVICUS, les membres du parti CNL ont subi à plusieurs reprises des menaces, des arrestations, des tortures et des violences commises par les forces gouvernementales et l'aile jeune du parti au pouvoir, les Imbonerakure.
Le 17 novembre 2019, Agathon Rwasa, président du principal parti d'opposition du pays, le CNL, a confirmé la participation de son parti aux élections générales de mai 2020. Rwasa a dénoncé les efforts du parti au pouvoir pour dissoudre son parti et a appelé les administrateurs des municipalités à respecter les droits et libertés des citoyens.
D'autre part, le 20 novembre 2019 le président américain Donald Trump a écrit au Congrès américain pour l'informer qu'il prolongeait l'état d'urgence nationale pour le Burundi. Cette mesure restreint les voyages, les affaires et l'aide des États-Unis à un pays désigné. Elle a été imposée pour la première fois par le prédécesseur de Trump, Barack Obama, en 2015. Elle a été appliquée après que le Burundi a plongé dans une crise politique suite au souhait controversé du président Pierre Nkurunziza de se présenter à un troisième mandat. L'écrit signale que la situation au Burundi constitue toujours une menace inhabituelle et extraordinaire pour la sécurité nationale et la politique étrangère des États-Unis.
Liberté d'expression
Le 16 octobre 2019, l'organe régulateur des médias, le Conseil national de la communication (CNC), a présenté un code de conduite aux médias burundais pour les prochaines élections de 2020. Ce nouveau code les oblige à respecter la Constitution burundaise, la Loi sur la presse et la loi régissant le CNC. Les journalistes et les médias couvrant les élections de 2020 seront tenus de diffuser et de publier des informations impartiales et précises. En signant ce code les journalistes s'engagent également à ne publier aucun résultat différent de ceux communiqués officiellement par la commission électorale. Certains médias et organisations de la société civile ont toutefois considéré que cette mesure vise à contrôler la couverture médiatique pendant les élections. Le 21 novembre, le ministre burundais de l'Intérieur, Pascal Barandagiye, a déclaré que pendant la période électorale de 2020, les journalistes devraient « se ranger du côté du gouvernement » et que les médias ne devraient pas « tout dire ».
#Burundi #Media: Code of conduct presented by CNC raises concerns among media professionalshttps://t.co/x9zBnwLibI
— Egide Harerimana (@EgideLucky) October 17, 2019
Lors d'une autre affaire concernant des journalistes, le 22 octobre 2019, quatre journalistes du journal Iwacu et leur chauffeur ont été arrêtés et détenus pour atteinte présumée à la sécurité nationale. L'équipe de presse — la journaliste Christine Kamikazi, l'écrivaine politique Agnès Ndirubusa, le journaliste du service anglais Egide Harerimana, le photojournaliste Térence Mpozenzi et leur chauffeur Adolphe Masabarikiza — a été arrêtée dans la commune de Musigati, dans la province de Bubanza à l'ouest du Burundi, alors qu'elle se déplaçait pour couvrir les troubles ayant éclaté après que des hommes armés ont traversé la frontière depuis la République démocratique du Congo et ont affronté les forces de sécurité. Des organisations de défense des droits de l'homme telles que Human Rights Watch, le Comité pour la protection des journalistes et Reporters sans frontières (RSF) ont appelé à la libération immédiate et sans condition des journalistes.
Arnaud Froger, responsable du bureau Afrique de RSF, affirme :
« Ces journalistes faisaient simplement leur travail en vérifiant les informations faisant état d'affrontements armés. »
Un mois plus tard, le 20 novembre, la cour d'appel de Ntahangwa a ordonné que les quatre journalistes restent en détention tandis que leur chauffeur a été temporairement remis en liberté.