Burkina Faso: le militant Kémi Séba condamné pour «outrage» au président https://t.co/Ypk97ebPmP pic.twitter.com/rtw7WRyRpZ
— RFI (@RFI) December 26, 2019
Association
Détention de militants
Dans la soirée du 21 décembre 2019 des gendarmes ont arrêté le leader du groupe panafricain Urgences panafricanistes et militant anti-franc CFA Kémi Séba dans un hôtel de la capitale du Burkina Faso, Ouagadougou, pour avoir insulté le chef de l'État. Plus tôt dans la journée, Séba avait participé à un débat houleux sur le franc CFA (la monnaie ouest-africaine) à l'Université Joseph Ki-Zerbo, où il a qualifié le président burkinabé, Roch Marc Christian Kaboré, de « passoire politique ». Quelques jours plus tard, le 26 décembre 2019, un tribunal de Ouagadougou a condamné Séba à une peine de deux mois de prison avec sursis et à une amende de 200 000 francs CFA (330 USD) pour avoir insulté le chef de l'État et des chefs d'État étrangers.
Hervé Ouattara du front anti-CFA au Burkina Faso, qui avait invité Kémi Séba à l'événement public, a déclaré à BBC Afrique que sa résidence avait été attaquée le soir même par un groupe de jeunes qui chantaient l'hymne national et qui ont lancé des pierres en criant « à bas Kémi », « à bas Hervé ».
Le militant franco-béninois avait été arrêté ou expulsé de plusieurs pays d'Afrique de l'Ouest ces dernières années en raison de son militantisme anticolonialiste et de ses actes de protestations contre le franc CFA : du Sénégal en 2017, de Guinée en mars 2018 et de la Côte d'Ivoire en mars 2019.
Des agents de police ont placé sous détention dans un lieu inconnu le cybermilitant Naïm Touré dans la nuit du 12 au 13 novembre 2020 et cela jusqu'à quelques heures plus tard. La police nationale a déclaré plus tard que Touré était accusé de « tentatives de démoralisation des forces de défense et de sécurité » en raison de commentaires qu'il avait faits sur les réseaux sociaux concernant certaines promotions au sein de la hiérarchie militaire. Il a été remis en liberté le 14 novembre 2019 sans que des accusations soient formulées contre lui. Comme nous l'avons indiqué précédemment sur le Monitor, Naïm Touré avait été condamné en juillet 2018 à une peine de prison de deux mois pour « incitation à la révolte » à cause d'une publication sur Facebook.
Menaces de mort
Le secrétaire général du groupe de la société civile Collectif contre l'impunité et la stigmatisation des communautés (CISC) Daouda Diallo, a affirmé en janvier 2020 qu'il avait reçu des menaces de mort. Le CISC s'est constitué au lendemain des massacres à Yirgou, dans la province de Sanmatenga, début janvier 2019, afin de demander justice pour les dizaines de personnes assassinées dans des violences intercommunautaires et pour lutter contre la stigmatisation des communautés.
With the rise of terrorism, journalists in Burkina Faso work in fear on two fronts receiving threats from both government and rebel groups reports @TheMFWA: https://t.co/vG7yqTvJsS @CIVICUSMonitor @AUC_DPA @globalfreemedia
— IFEX (@IFEX) March 13, 2020
Expression
Rapport sur l'impact négatif du terrorisme sur la liberté de la presse
Un rapport de la Fondation des médias pour l'Afrique de l'Ouest (MFWA par ses sigles en anglais) décrit les effets négatifs du terrorisme sur les libertés des médias au Burkina Faso ces dernières années. Le paysage médiatique diversifié du Burkina Faso comprend 87 journaux, 25 médias numériques, 163 stations de radio et 33 chaînes de télévision. Tous ces médias opèrent dans un « contexte marqué par le terrorisme, les affrontements ethniques, les menaces contre la sécurité des journalistes et un cadre législatif hostile » qui nuit à l'indépendance des médias et qui a conduit à une autocensure accrue des journalistes et des professionnels des médias.
Selon cette organisation pour la liberté de la presse, il y a eu une augmentation des menaces à l'encontre des journalistes et des professionnels des médias en fonction des informations publiées. Ces menaces viennent autant de l'armée que des groupes terroristes. En outre, dans les zones les plus touchées par les actions des groupes terroristes, tels que Hauts-Bassins, Boucle du Mouhoun, Nord, Sahel et Est, les journalistes ont signalé des difficultés croissantes pour accéder à leurs sources d'information, car les citoyens hésitent à partager des informations par crainte de représailles. De plus, le cadre juridique régissant la liberté de la presse s'est détérioré depuis que l'Assemblée nationale du Burkina Faso a adopté en juin 2019 une loi modifiant le Code pénal, qui comprend plusieurs dispositions restreignant la liberté d'expression, la liberté de la presse et le droit à l'information. Comme nous l'avons indiqué précédemment sur le Monitor, les journalistes et les citoyens pourraient être condamnés à de lourdes peines de prison s'ils venaient à publier des informations concernant des opérations militaires. Un journaliste confie à la MFWA :
« Une épée de Damoclès pend sur la tête des journalistes, elle pourrait tomber à tout moment. »
Attaque contre la résidence d'un journaliste d'investigation
Dans la matinée du 7 janvier 2020 des inconnus ont attaqué le domicile du journaliste d'investigation et rédacteur en chef du bimensuel Courrier Confidentiel , Ladji Bama, à l'aide d'un cocktail Molotov qui a atteint et brûlé sa voiture. Dans un communiqué de presse, plusieurs médias burkinabés, dont le Centre national de presse Norbert Zongo et l'Association des journalistes du Burkina, ont condamné les attaques et commenté :
« Au Burkina nous assistons depuis un certain temps au retour de pratiques antidémocratiques d’une autre époque à travers des exécutions extra-judiciaires, des intimidations et des menaces de mort... »
Assassinat du journaliste Norbert Zongo en 1998 : la France autorise l'extradition du suspect principal
Les autorités françaises ont signé le 3 mars 2020 l'ordonnance d'extradition de François Compaoré vers le Burkina Faso dans l'affaire du meurtre du journaliste d'investigation Norbert Zongo en décembre 1998. François Compaoré, frère de l'ancien président Blaise Compaoré, est accusé d'avoir orchestré le meurtre du journaliste et de trois autres personnes assassinées aux côtés de Zongo. Au moment de son assassinat Zongo travaillait sur un rapport d'enquête sur le meurtre de David Ouédraogo, chauffeur du président de l'époque Blaise Compaoré.
Assane Diagne de Reporters sans frontières se félicite :
« L'exécution de la demande d'extradition, qui peut encore faire l'objet d'un appel, est la priorité. Plus de vingt ans après le meurtre de ce journaliste, sa famille et ses collègues attendent toujours que justice soit rendue. Norbert Zongo ne doit plus être le symbole de l'impunité pour le meurtre de journalistes. »
Réunion pacifique
Interdiction de manifestations des OSC
Les autorités municipales auraient interdit un sit-in du Collectif contre l'impunité et la stigmatisation des communautés ( CISC), prévu le 10 janvier 2020 devant le Palais de Justice de Ouagadougou afin de demander justice pour le massacre de Yirgou. Selon le CISC, les autorités ont interdit le sit-in au motif qu'il perturberait le fonctionnement du Palais de justice.
Le 17 septembre 2019, la police a dispersé une manifestation organisée par plusieurs syndicats et organisations de la société civile pour dénoncer des délits économiques, la mauvaise gestion de la crise sécuritaire et pour exiger le départ des troupes étrangères de Ouagadougou. Cette intervention s'est soldée par plusieurs manifestants blessés. Les autorités municipales avaient auparavant interdit cette manifestation. Les organisateurs de la manifestation ont déclaré que toutes les exigences légales pour l'obtention de l'autorisation de la manifestation avaient été respectées et que, par conséquent, son interdiction n'était pas justifiée.