À la mi-juillet 2020 la Commission d'enquête des Nations unies sur le Burundi a exprimé sa préoccupation après l'investiture et le discours d'investiture du nouveau président Évariste Ndayishimiye. Doudou Diène, président de cette commission, a soulevé que le discours était ambigu et qu'il semblait justifier l'imposition de restrictions aux libertés d'expression, d'information et de réunion au nom de la préservation de la culture burundaise. Au cours de son discours Evariste Ndayishimiye a également fait des remarques inquiétantes à propos des défenseurs des droits de l'homme, des lanceurs d'alerte et des personnes qui critiquent le gouvernement.
Peu de temps après son investiture le président Ndayishimiye a annoncé la constitution d'un cabinet de quinze membres, dont deux ont fait l'objet de sanctions américaines ou européennes pour leur rôle présumé dans des violations des droits de l'homme lors de la crise qui a éclaté en avril 2015, lorsque le président Nkurunziza a annoncé son intention de se présenter pour un troisième mandat controversé. Les deux responsables faisant l'objet de sanctions internationales sont le Premier ministre Alain Guillaume Bunyoni, qui fait l'objet de sanctions américaines ciblées depuis 2015, et Gervais Ndirakobuca — également connu sous le nom de « Ndakugarika » — qui figure également sur les listes de personnes frappées par des sanctions américaines et européennes.
Avant la 45 e session du Conseil des droits de l'homme des Nations unies qui se tiendra entre le 14 septembre et le 6 octobre 2020, plus de quarante organisations de la société civile ont exhorté les États à soutenir le renouvellement du mandat de la Commission d'enquête sur le Burundi.
D'autre part, après l'élection du nouveau président Évariste Ndayishimiye, plus d'une douzaine de personnes ont été incarcérées à la mi-août 2020, dont des policiers et des membres de la milice de jeunes Imbonerakure, après avoir été reconnus coupables d’extorsion envers des travailleurs migrants revenant de Tanzanie. Ces décisions de justice ont été considérées comme une étape positive dans la lutte contre l'impunité au Burundi.
#AmnestyInternational OPED: Time to release Burundian human rights defender Germain Rukuki https://t.co/FTAzPK6Th0 #Burundi
— EyeOnRwanda/Burundi (@KigaliBujumbura) July 13, 2020
Liberté de réunion pacifique
En juillet 2020 Amnesty International a essayé de susciter un regain d'intérêt pour le cas du défenseur des droits de l'homme Germain Rukuki, emprisonné depuis trois ans. Rukuki purge actuellement une peine de 32 ans de prison pour des accusations liées aux manifestations de masse qui se sont produites après la décision du défunt président Nkurunziza de briguer un troisième mandat en 2015. Amnesty International a appelé le président nouvellement élu à reconsidérer les accusations.
Suite aux revendications constantes d'un groupe d'organisations de la société civile en faveur des défenseurs des droits de l'homme burundais, la FIACAT a fait savoir le 30 juillet 2020 que la Cour suprême du Burundi avait décidé de casser l'arrêt condamnant Germain Rukuki à une peine de 32 ans de prison et de renvoyer l'affaire devant une cour d'appel.
THE IMAGE - The #Iwacu press group #journalists and other local journalists pay tribute to Jean #Bigirimana missing for four years #FreePress #BurundiCrisis #Burundi 🇧🇮 pic.twitter.com/WrFcAc9FzV
— SOS Médias Burundi (@SOSMediasBDI) July 22, 2020
Liberté d'expression
Le 22 juillet 2020 Iwacu a organisé une cérémonie à la mémoire du journaliste Jean Bigirimana, disparu il y a quatre ans jour pour jour. Bigirimana aurait été arrêté par des agents du renseignement et personne ne l'a vu depuis. Pendant cette cérémonie a également été évoqué le sort des journalistes disparus ou arrêtés depuis lors, dont les quatre journalistes d'Iwacu actuellement en prison.
Les terribles défis auxquels sont constamment confrontés les journalistes ont été réitérés le 3 août 2020, lorsque le magazine Time a désigné l’emprisonnement des quatre journalistes du groupe Iwacu comme le cinquième cas le plus urgent de menaces à la liberté de la presse dans le monde. Cette affaire était la seule d'Afrique subsaharienne à figurer dans le top dix, mettant ainsi en évidence la situation désastreuse des médias burundais. Comme nous l'avons indiqué précédemment sur le Monitor CIVICUS, les quatre journalistes — Christine Kamikazi, Agnès Ndirubusa, Egide Harerimana et Térence Mpozenzi — ont été arrêtés le 22 octobre 2019 alors qu'ils se déplaçaient pour couvrir des troubles ayant éclaté après que des hommes armés ont pénétré dans le pays depuis la République démocratique du Congo et ont affronté les forces de sécurité. Ils ont été condamnés à deux ans et demi d'emprisonnement en janvier 2020 et leur appel a été rejeté en juin 2020.
Burundi’s government is failing to communicate fact-based information on the Covid-19 pandemic and preventing doctors and nurses from responding adequately. https://t.co/bEMUIyaPO6 pic.twitter.com/Envt3yKD3Q
— Audrey Kawire Wabwire (@akawire) June 24, 2020
D'autre part, un rapport publié fin juillet par Human Rights Watch (HRW) concernant la réponse du Burundi à la pandémie de COVID-19 a mis en évidence la réduction au silence des médecins et des travailleurs de la santé à qui on a dit de ne pas parler de pénurie d'équipements ou de symptômes dans leur hôpital. Un médecin a fait savoir à HRW qu'on lui avait également dit de ne pas parler de cas suspects ni de diffuser publiquement des informations. Les travailleurs de la santé ont déclaré craindre des représailles s'ils s'exprimaient. Toutefois, depuis l'investiture du président Ndayishimiye les autorités burundaises semblent avoir adopté une nouvelle approche plus transparente pour combattre la pandémie de COVID-19.
Liberté d'association
En juillet 2020 le principal parti d'opposition, le Congrès national pour la liberté (CNL), a affirmé que depuis les élections présidentielles, législatives et locales de 20 mai 2020, ses bureaux dans cinq localités ont été la cible d'actes de vandalisme. Cela comprend la démolition du bureau de Rumonge le 16 juillet 2020. Le CNL a signalé également des menaces et des actes d'intimidation contre ses membres. Le parti n'a pas réussi à contacter certains de ses membres.
Alors que les dirigeants de l'opposition continuaient de faire face à des défis dans le pays, le 24 août 2020 dans un discours télévisé, le président Ndayishimiye a fait référence aux dirigeants de l'opposition en exil et les a mis en relation avec le « soutien à l'homosexualité ». Ndayishimiye a également utilisé cette occasion pour attaquer spécifiquement la communauté LGBTIQ+ en affirmant que l'homosexualité était à l'origine de la pandémie COVID-19. Il a ajouté que le Burundi rejette l'homosexualité et qu'elle y est considérée comme une « malédiction ».